3 - Contiguum Urgence / Réhabilitation / Développement

3.2 - L’évolution des liens entre actions d’urgence et de développement

Le Groupe URD, participant activement depuis plus de vingt ans aux réflexions et débats internationaux sur les évolutions de ces secteurs, son site web urd.org est donné comme source principale d’accessibilité pour les documents présentés. Ceux-ci sont produits en lien avec les acteurs majeurs : sociétés civiles comme institutionnelles, nationales comme internationales des secteurs U et D avec une prédominance sur le secteur de l’Urgence Humanitaire.

De plus, toute l’activité de think tank du Groupe URD sur les enjeux et évolutions internationales URD fait l’objet d’une mise en ligne de documents de capitalisation comme de vidéos liées à ces terrains d’observation et séminaires de réflexions. La majeure partie des références données se trouve dans le moteur de recherche du site URD sous la rubrique thématique : Lien urgence développement.

3.2.1 - Des concepts à décrypter pour s’intéresser aux secteurs de l’aide internationale

Crise – Vulnérabilité – Risque – Urgence/emergency – Développement - Relèvement rapide/ Early recovery – LRRD – Résilience – reconstruction – IDPs ... : Il est impossible de comprendre ce qui se passe sur ces secteurs d’intervention si on ne cherche pas à décoder auparavant le sens et l’importance pour ces secteurs de ces notions, qui de thèmes de réflexion et débats contradictoires entre secteurs d’intervention de la Communauté Internationale de la Solidarité deviennent successivement des concepts communs puis des outils d’actions adéquats et de financements dédiés.

Les concepts employés par le secteur de l’aide internationale relèvent d’une volonté de langage commun d’interprétation adaptée aux situations et aux outils particuliers de gestion des crises, plus que de définitions de dictionnaire. Ces notions sont d’autant plus particulières à ces secteurs d’intervention post crise qu’elles correspondent à un langage dominé par l’anglais, (donc sujettes à interprétation) et par des réponses à inventer au fur et à mesure de la nécessité d’améliorer les réponses aux crises. Ce glossaire sert à décoder les échanges et les outils de ces secteurs de l’aide.

Lire les définitions des mots « continuum », « contiguum », « crise », « réhabilitation », « résilience » et « relèvement rapide ».

Objectif pédagogique

Repérer les concepts, leurs interprétations et leurs implications en termes d’action par les différents acteurs des interventions de l’aide post crise, ceci afin de comprendre les enjeux et cadres des réponses aux crises et surtout aux sorties de crises pour les populations affectées.

Définition

Continuum

n. m. XXe siècle. Mot latin, neutre de l'adjectif continuus, « continu », déjà comme terme de mathématiques en bas latin. En Physique : Ensemble, dont les éléments constituent un tout indissociable. Le continuum espace-temps.

Source : Dictionnaire de l’Académie française

Concept de continuum appliqué au secteur humanitaire

Schéma linéaire d’évolution des crises : « avant crise, pendant la crise, sortie de crise, développement » (qui donne lieu au découpage de l’aide en urgence, réhabilitation, développement).

Source : Support de cours janvier 2009 tiré de l’ouvrage : PIROTTE, Claire, HUSSON, Bernard, GRÜNEWALD, François, 1997. Entre Urgence et Développement. Paris : Khartala. 240 p. Coll. Pratiques Humanitaires.

Définition

Contiguum

Mot latin, n’existant pas dans tous les dictionnaires français mais dérivé des mots contigu et contiguïté qui signifie un état de ce qui touche à autre chose : accolé, attenant, voisin.

Source : Dictionnaire Robert de la langue française

Concept de contiguum appliqué au secteur humanitaire

Contexte dans lequel existe de façon juxtaposée et souvent inversée des zones en crise et des zones calmes. Consacré en 1998 par la commission économique et sociale des Nations Unies.

Source : Support de cours URD janvier 2009 tiré de l’ouvrage : PIROTTE, Claire, HUSSON, Bernard, GRÜNEWALD, François, 1997. Entre Urgence et Développement. Paris : Khartala. 240 p. Coll. Pratiques Humanitaires.

Définition

Crise

Compréhension généralement admise

La notion de crise est complexe, poly sémantique, s’utilise dans de nombreux champs (santé, économique, diplomatique, financière, épidémiologique…conflit, guerre). C’est un moment où un processus de changement radical s’impose ou devient nécessaire : selon les sources la crise est définie comme une phase critique ; une rupture d’équilibre.

Concept de crise appliqué au secteur humanitaire

La crise a été longtemps considérée comme un moment de rupture dans un processus continu qui après une réponse adéquate disparaît pour laisser place à une situation redevenue normale. Impliquant des décisions d’interventions de la Solidarité internationale, la crise est apparue comme un temps et une situation de plus en plus compliquée dans l’histoire des processus de l’aide : très grande diversité, multiplication, natures, contextes et niveaux de gravité d’impacts très différents (catastrophes naturelles, conflits, accident, conjoncture, latence, récurrence, chronicité pour n ‘en citer que quelques aspects). Aussi le secteur de l’aide a tendance aujourd’hui à parler - des crises et non de la crise » ; d’autre part les notions - d’avant-crise, pendant la crise et après-crise -  ont été complètement mises en question par le fait que les crises perdurent sans que les situations de sortie de crise n’apparaissent clairement.

Source : GRÜNEWALD, François, TESSIER, Laurence, 2001. « Zones grises, crises durables, conflits oubliés les défis humanitaires ». In : Revue internationale de la Croix-Rouge [en ligne]. juin 2001. Vol. 83, n°842, p.323‑351. Disponible sur : http://www.urd.org/IMG/pdf/Crises_durables_crises_oubliees.pdf

Définition

Réhabilitation

Difficile de trouver une définition commune aux différents champs où ce terme peut avoir un sens mais on peut en extraire : le fait de rétablir une situation. En tout état de cause il s’agit d’une phase ou action de transition entre une situation initiale qui a subi une déstabilisation et une action de redressement.

Concept de réhabilitation appliqué au secteur humanitaire

Dans le cadre de l’approche chronologique séparée et linéaire d’un processus – Urgence-Réhabilitation-Développement – d’une réponse de l’aide aux crises, la définition d’une phase de « réhabilitation » a été la solution avancée pour nommer cette phase intermédiaire difficilement définissable pour l’ensemble des acteurs et en particulier pour la mobilisation financière des bailleurs. Traitée souvent de – phase grise ou zone grise - la réhabilitation recouvre des réalités très diverses et des laps de temps difficilement prévisibles. On peut retenir comme objectif de réhabilitation, la volonté de recréer les conditions d’une vie normale et d’assurer au plus vite un minimum de viabilité économique et sociale.

Cependant la notion de réhabilitation prêtant à trop d’interprétations n’a pas été retenue par le secteur humanitaire comme un concept d’où dériveraient des pratiques communes, et un type de financement d’action. Une première définition avait été engagée par un représentant de l’ONU dès 2003, d’après un texte « Avant, pendant et après les crises, Comment mieux lier Urgence réhabilitation développement » :

« Jusqu’à la chute du mur de Berlin en 1989, la plupart des conflits étaient « bloqués ». Le lien « urgence-développement » s’était surtout avéré pertinent face aux catastrophes naturelles autour du concept du continuum linéaire entre urgence et développement. L’aide d’urgence classique était le fait d’institutions et agences internationales ou d’ONG. Pourtant, les besoins des populations des pays touchés étaient largement plus diversifiés que ce que permettait de faire la palette de l’urgence. C’est dans ce contexte qu’en1979, feu Sir Robert Jackson, représentant spécial du Secrétaire général des Nations unies pour l’aide au peuple cambodgien, a créé le « concept de réhabilitation d’urgence… » Le concept de « réhabilitation d’urgence » permettait de faire du« quasi-développement » et de répondre aux vrais besoins des populations … Cette approche, très innovante lorsqu’elle a été mise en place par le CICR (Comité international de la Croix-Rouge) au Soudan (1988) ou en Somalie (1991-92), a pu être testée ailleurs en Afrique, dans les Balkans, en Afghanistan, etc. Cette application d’une approche plus inspirée du développement que de l’action d’urgence a pris pied dans les pratiques de nombreux humanitaires et les bailleurs ont été conquis. »

Source : GRÜNEWALD, François, 2003. « Avant, pendant et après les crises : comment mieux lier urgence, réhabilitation et développement ». In : le Courrier ACP-UE [en ligne]. juin 2003. n°198, p.32‑33. Disponible sur : http://www.urd.org/IMG/pdf/publispe_avt_pdt_ap_crises_LRRD.pdf

Définition

Résilience

Concept de résilience appliqué au secteur humanitaire par l’ONU

La capacité d’un système, une communauté ou une société exposée aux risques de résister, d’absorber, d’accueillir et de corriger les effets d’un danger, en temps opportun et de manière efficace, notamment par la préservation et la restauration de ses structures essentielles et de ses fonctions de base.

Source : NATIONS UNIES, 2009. 2009 UNISDR Terminologie pour la prévention des risques de catastrophe [en ligne]. Genève, Suisse : Nations Unies. Disponible sur : http://www.unisdr.org/files/7817_UNISDRTerminologyFrench.pdf

Concept de résilience appliqué au secteur humanitaire par DFID

La résilience vis-à-vis des catastrophes est la capacité des pays, des communautés et des ménages à s’adapter au changement, en conservant ou en transformant leur niveau de vie (living standards) face à des chocs ou des stress – comme un tremblement de terre, une sécheresse ou un conflit – sans compromettre leurs perspectives à long terme.

Source : DEPARTMENT FOR INTERNATIONAL DEVELOPMENT, UKAID, 2011. Defining Disaster Resilience: A DFID Approach Paper [en ligne]. Disponible sur : https://www.gov.uk/government/uploads/system/uploads/attachment_data/file/186874/defining-disaster-resilience-approach-paper.pdf

Concept de résilience appliqué au secteur humanitaire par le Groupe URD

La résilience, quant à elle, se définit comme la capacité d’un individu, d’un foyer, d’une communauté, d’un pays ou d’une région à résister, s’adapter et récupérer rapidement suite à des stress et des chocs. Dans cette définition, l’élément intéressant est la notion de « rebondir ». La résilience est ainsi vue comme un concept plus large (englobant celui de Relèvement Rapide), puisqu’elle ne se focalise pas uniquement sur la réponse aux chocs, mais également sur la prévention et la préparation aux risques, ceci en appui aux processus de développement.

Source : LÉON, Valérie, MICHON, Coline, 2015. « Quelle approche pour la mesure de la résilience ? ». In : Humanitaires en Mouvement [en ligne]. décembre 2015. n°16, p.17‑21. Disponible sur : http://www.urd.org/Quelle-approche-pour-la-mesure-de

Définition

Relèvement rapide / Early recovery

Concept essentiellement imaginé pour le secteur humanitaire

Définition par l’ONU

Le relèvement rapide est une approche qui répond aux besoins de relèvement qui surgissent lors d’une phase humanitaire d’urgence, en utilisant les mécanismes humanitaires qui sont en lien avec les principes de développement. Il permet aux populations d’utiliser les avantages de l’action humanitaire pour saisir les opportunités de développement, de résilience, et d’établir un processus durable de sortie de crise. Le relèvement rapide est un élément essentiel de toute réponse humanitaire efficace. Sa planification devrait commencer au tout début de la crise.

Source : IASC - 2013 (cf. document : GROUPE URD, 2015. Le relèvement rapide, envisager sans césure le passage de l’action d’urgence à la reconstruction et au développement [en ligne]. Disponible sur : http://www.urd.org/Projet-de-renforcement-de-la)

Notion de relèvement rapide : par le Groupe URD

De nombreux concepts ont récemment germé dans le secteur de l’aide, avec diverses interprétations opérationnelles parmi les acteurs, ce qui crée une grande confusion. Parmi ces nouveaux termes, le relèvement rapide constitue le premier segment d’un retour à une certaine normalité (telle qu’avant la crise) dans le temps de la réponse humanitaire. Les actions de ce type ont ainsi pour objectif de réduire la sévérité et la durée de la crise, et, selon la modalité d’intervention, permettront de poser les bases de la résilience à plusieurs niveaux (individus, communauté, société, etc.) et, par conséquent, celles d’un développement durable.

Source : LÉON, Valérie, MICHON, Coline, 2015. « Quelle approche pour la mesure de la résilience ? ». In : Humanitaires en Mouvement [en ligne]. décembre 2015. n°16, p.17‑21. Disponible sur :